Les records de la Micheline
Article publié le 15/08/1999 dans "La Dépêche"
Tarn - Albi : Histoire ferroviaire
Bernard Vieu, un passionné d'histoire ferroviaire, raconte l'histoire de la ligne Carmaux-Vindrac, qui n'a fonctionné que pendant deux ans et demi.
Il y a un peu plus de soixante ans, le 1er-juillet 1939, que le «Micheline» accomplissait son dernier voyage entre Carmaux et Vindrac le long de la vallée du Cérou en desservant Monestiés, Salles, Campes et Cordes.
Bien peu de personnes ont connu cette ligne SNCF vu qu'elle fut exploitée que durant deux ans et un mois, un record à la SNCF. Cette ligne éphémère fut l'une des dernières ouvertes en France, le 31-mai 1937, et elle cumule bien d'autres records.
Concédée à la compagnie du Midi le 19-juillet 1905, cette ligne longue de 25,2-km était destinée à faciliter l'écoulement du charbon de Carmaux mais les travaux de construction ne débutèrent qu'en pleine Première Guerre mondiale en 1915 pour s'achever qu'en 1931 ! Alors que la voie était en place, le Midi fera tout pour ne pas exploiter cette ligne vouée au déficit.
Trois allers-retours
C'est le ministre des Travaux publics de l'époque, Camille Chautemps, qui donna l'ordre en 1936 de vérifier la voie pour ouvrir enfin la ligne qu'aux seuls trains de voyageurs. Les stations construites dans un style moderne à l'époque (Monestiés, Salles et Cordes) ne verront pas l'ombre d'un employé et c'est le contrôleur du train qui délivrait les billets.
Il y avait trois allers et retours quotidiens (matin, midi et soir), celui de midi fut supprimé en 1938. Les trains étaient assurés par des autorails Renault VH et des autorails sur pneus Michelin, les fameuses «Michelines» dont l'appellation est employée à tort pour l'ensemble des autorails.
Ces deux types d'engins étaient basés au dépôt de Carmaux. Pendant la guerre, l'obstruction du tunnel du Chêne entre Carmaux et Albi motiva le déblaiement de la ligne Carmaux-Vindrac occupée par wagons vides pour permettre le passage d'un seul train de charbon à la mi-1944. De la fin 1944 à avril 1945, la voie fut enlevée et la ligne fut déclassée le 3-septembre 1953. Les bâtiments des gares et des 31-passages à niveau furent vendus. Celui de la gare de Cordes servit plus d'une dizaine d'années de centre de colonie de vacances SNCF.
Noria de camions
Les Houillères récupérèrent un morceau de la ligne non déposée au départ de Carmaux (2,5-km) et dans les années-60, une usine de produits chimiques implantée en contrebas de la route de Carmaux à Monestiés expédia ses produits par wagons grâce à ce morceau de voie conservée qui fut doté d'un faisceau à trois voies dans l'enceinte de l'usine.
Fermée dans les années 70, la voie demeura et ne fut pas utilisée pour desservir l'usine de carrelage implantée dans les années 80 à proximité. Houillères s'opposant à une desserte ferroviaire transitant sur leurs «terres», c'est une noria de camions qui amène les matériaux depuis la gare de Carmaux à travers la ville malgré les risques encourus (accidents, bruit, pollution). De cette ligne éphémère, il reste encore outre les bâtiments évoqués, le tunnel du Colombier (137,2-m) près de Monestiés et les nombreux ponts enjambant à plusieurs reprises le Cérou.
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